De 1979 à 1981

Premiers éclats d’une voix libre

Entre 1979 et 1982, Li Shuang développe une œuvre profondément intuitive, marquée par l’urgence de créer hors des cadres officiels. Refusant le réalisme socialiste imposé, elle peint depuis l’intime : visions intérieures, figures énigmatiques, états d’âme silencieux mais puissants.

Ses œuvres mêlent symbolisme et révolte, spiritualité et inconscient. Dans "Le puit du Désir" ou "La Lumière de l’Espoir", elle explore les tensions du féminin, la solitude face au pouvoir, et les métamorphoses de l’âme sous pression.

Peu avant son arrestation en 1981, son geste devient plus urgent encore, presque visionnaire. Chaque tableau porte une charge émotionnelle intense, comme arraché au silence. C’est dans ces premières années que naît sa voix propre : libre, insoumise, et déjà universelle.

L'amour filial sur les cordes

1981, Huile sur toile, 70 x 89 cm

Le puit du désir

1981, huile sur toile, 185 x 138 cm Une œuvre visionnaire, peinte dans un appartement diplomatique juste avant mon arrestation. On y voit d’étranges créatures colorées tourbillonner vers un puits noir. À l’époque, je n’avais pas encore de titre. Mais une fois enfermée, ce nom m’est revenu : Le Puits du Désir. Ce tableau m’a semblé prophétique. Il m’annonçait ma chute, ma solitude, ma confrontation avec le gouffre.

Lumière de l'espoir

1981, huile sur toile, 100 × 70 cm Exposée lors de la 2ᵉ Exposition des Étoiles, Pékin Un jour ordinaire, dans le calme d’un après-midi, j’ai soudain senti une image s’imposer à moi. Elle gonflait dans mon esprit, puis se réduisait à un point, sans jamais perdre sa clarté. Je n’avais pas de toile. Alors j’ai arraché mon drap vert, et j’ai peint. Le tableau représente une femme debout sur un chemin suspendu. Ses jambes sont entravées par des ronces. Devant elle, une ligne d’yeux s’élève.

Au crépuscule

1981, Huile sur toile, 130x130 Ceci est une œuvre prophétique, créée avant que les événements qu’elle annonçait ne se produisent. Si j’avais su ce qui allait arriver, en tant qu’être humain naturellement en quête de confort, j’aurais tout fait pour l’éviter. Ainsi, ne pas savoir dans la troisième dimension ne signifie pas que l’on ignore aussi dans les dimensions supérieures. On peut dire que toutes les « épreuves » de notre vie sont des créations d’une finesse inégalable par notre âme.

La solitude

1981, huile sur toile, 67 × 91 cm

Le rouge et le noir

1979, Huile sur toile, 63 x 50 cm

Une rencontre

1980-81, Huile sur toile, 107 x 80 cm

La femme aveugle

1979/1981, Huile sur toile, 62 × 89 cm La femme aveugle, c’est moi , à deux moments différents. Dans le passé : une jeune fille refusant de voir une réalité trop cruelle. Dans le présent : une femme qui regarde avec les yeux de l’âme. Le rossignol en cage symbolise cette âme, à la fois prisonnière et capable de s’envoler. Malgré les années, cette œuvre conserve un pouvoir actif : elle accompagne encore aujourd’hui ceux qui la contemplent.